Ressources numériques en sciences humaines et sociales OpenEdition Nos plateformes OpenEdition Books OpenEdition Journals Hypothèses Calenda Bibliothèques OpenEdition Freemium Suivez-nous

Mayotte, laboratoire des possibles : par-delà le piège identitaire et le déterminisme postcolonial

Par Anthony Goreau-Ponceaud, Maître de conférences, Université de Bordeaux, UMR 5115 LAM, Institut Français de Pondichéry ICM et Olivier Chadoin, Professeur de sociologie, ENSAP, PAVE/CED CNRS 5116.

Article publié dans le cadre du projet Migrations, asiles et frontières à La Réunion et Mayotte – MIGRAF (AAP MSHBx 2024).


On te demande si tu as été sur l’îlot de sable blanc et tu racontes cette merveilleuse journée de plongée dans le plus beau lagon du monde, car, maintenant tu en es sûr, c’est le plus beau lagon du monde puisque de tes yeux, tu l’as vu ce monde émeraude et opaline et, même si tu sais que des centaines de personnes meurent dans ce lagon-là, tu le dis quand même C’est le plus beau lagon du monde. On te chuchote que la moitié des habitants de Mayotte est constituée de clandestins, que tous les équipements de l’île ont été conçus pour deux cent mille habitants mais qu’officieusement il y aurait presque quatre cent mille personnes sur l’île et tu te dis Mais ce n’est pas possible, ça va exploser, et cette phrase que tu prononces a été prononcée des milliers de fois avant toi. On te dit Regarde lui c’est un Mahorais, lui c’est un Grand Comorien, lui c’est un Anjouanais, lui c’est un Malgache mais pour toi, en réalité, ils se ressemblent tous. On te propose une balade sur les chemins de traverse et tu t’émerveilles de tous ces potagers et ces maisons sur les hauteurs. On te dit que ce sont les Anjouanais clandestins qui s’occupent de l’agriculture et que ces maisons en hauteur sont occupées par les muzungus. On te dit que si ça continue, si l’État français ne fait rien, ce sont les Mahorais eux-mêmes qui prendront leur destin en main et ficheront tous les clandestins et les délinquants dehors. Tu as alors l’image de centaines de Noirs descendants dans la rue avec des machettes et tu ne sais plus si c’est une image du Rwanda ou du Zimbabwe ou du Congo et tu te dis ça n’arrivera jamais dans un département français.
(Appanah, 2016 : 145-146).

Services de santé saturés, coupures d’eau, écoles surchargées[1] soumises à la rotation des élèves par manque de salles, architecture quasi-carcérale des Lycées par peur des caillassages réguliers des bus scolaires[2], agressions à la machette[3], coupeurs de routes[4], « délinquance hors norme[5] », trafic de la « chimique » (Richeval et 2023), mobilités entravées, opérations « balades tranquilles[6] » déployées par la gendarmerie afin de laisser la possibilité aux habitants de se réapproprier l’île sans risquer une agression : le constat est sombre et la vie sociale à Mayotte semble empêchée. Certains habitants s’interdisent de sortir la nuit tombée, de fréquenter les lieux identifiés comme à « hautes turbulences[7] » et s’imposent à eux-mêmes un couvre-feu.

L’île est fréquemment secouée par des crises multiples qui se résument autour de trois mots : immigration (systématiquement qualifiée de clandestine), insécurité (souvent pensée comme le corollaire de cette immigration) et déficiences des services publics (que ce soit l’éducation, la santé, le logement, les politiques sociales, ou encore l’approvisionnement en eau potable). Le tout en lien avec une réelle explosion démographique. Depuis 1958, la population de l’île (23 364 habitants) a décuplé pour atteindre 321 000 habitants au 1er janvier 2024 et les projections pour 2050 oscillent entre 440 000 et 760 000 habitants[8].

La population reste bien plus jeune qu’ailleurs en France : l’âge moyen est de 23 ans (contre 41 ans en France métropolitaine) et l’âge médian est légèrement inférieur à 18 ans. Les moins de 25 ans représentent 60 % de la population (contre 30 % en métropole) et connaissent des niveaux de pauvreté, de déscolarisation et de chômage particulièrement élevés. Comme le rappelle Nicolas Roinsard, « majorité démographique, la jeunesse mahoraise a tout d’une minorité sociologique » (2022 : 240). Ces jeunes en difficulté se subdivisent eux-mêmes en deux groupes inégaux : les Français (ceux qui n’ont pu partir vers La Réunion ou la métropole) et les étrangers qui constituent près de la moitié de la population, en raison d’une immigration importante depuis les Comores et des pratiques renouvelées de confiage (Morano, 2022 ; Roinsard, 2022)[9]. Leur intégration est entravée par le déficit structurel des dispositifs d’insertion, des politiques sociales à destination de la jeunesse, de la protection de l’enfance, des politiques éducatives : ils font alors l’expérience au mieux, de petits boulots, au pire, du chômage, de l’errance voire de la délinquance. Une situation aggravée par le manque de perspectives suscitées par le titre de séjour territorialisé[10].

Depuis les années 2000, les manifestations contre l’immigration clandestine et blocages[11] se multiplient et témoignent de l’existence d’un consensus, pour les collectifs citoyens, les médias nationaux et les rapports parlementaires, autour de l’idée que l’immigration constitue un problème pour le développement économique et social de l’île, une charge trop importante à assumer en somme qui mettrait au défi l’intégration politique de l’île (Roinsard, 2014). Ce niveau de tension sur l’île nourrit une opposition et une construction incessante de l’altérité et de la différence entre les établis que sont les Mahorais et les outsiders que sont les migrants. De même, compte tenu des revendications territoriales des Comores sur Mayotte depuis 1974, des discours véhiculent l’idée que les flux migratoires peuvent être mobilisés comme un outil géopolitique de déstabilisation de Mayotte. Près d’un habitant sur deux est d’origine étrangère et 95 % des étrangers sont Comoriens. Les discours flirtent souvent, sans la nommer toutefois, avec la théorie du grand remplacement.

Migrations à Mayotte : des régimes de visibilité

Le 2 octobre 2024, le ministre français de l’Intérieur Bruno Retailleau annonçait, en réponse à la question soulevée par la députée du Rassemblement National de la deuxième circonscription de Mayotte, Anchya Bamana, que « dès ce mois d’octobre, le préfet de Mayotte organisera – il en a reçu l’instruction – des vols groupés pour pouvoir reconduire les étrangers en situation irrégulière vers la République démocratique du Congo[12] ». Quelques mois plus tôt, en février, après l’obtention de leur statut de droit d’asile, ce sont plus de 300 migrants en majorité originaires de l’Afrique des Grands Lacs (République démocratique du Congo en particulier) et de la Corne de l’Afrique qui avaient déjà été évacués de Mayotte vers l’Hexagone[13].

Cette immigration en provenance d’Afrique n’est pas inédite (Moreau et Marszek, 2012). Des candidats à l’émigration fuyant l’instabilité politique de la région des Grands Lacs convergeait déjà depuis les années 2000 vers le port tanzanien de Dar-Es-Salam, pour ensuite se rendre à Mayotte, à partir des Comores (et spécifiquement Anjouan) ou directement depuis la Tanzanie. C’est l’intensité des flux empruntant cette route migratoire qui est devenue plus soutenue tout comme la diversification des origines : aux ressortissants de l’Afrique des Grands Lacs (République démocratique du Congo, Burundi, Rwanda, Ouganda et Tanzanie) se sont ajoutés des ressortissants Somaliens et Soudanais notamment.

Néanmoins, en 2023, sur les demandeurs d’asile qui ont été hébergés en Hébergement d’Urgence pour Demandeurs d’Asile (HUDA)[14] à Mayotte, plus de 97 % restaient originaires de la région des Grands Lacs. Bien entendu cela ne dit rien des flux qui échappent au dispositif national d’accueil, ou bien de celles et ceux qui ne sont pas encore passés par l’étape de la Structure de Premier Accueil, d’orientation et d’accompagnement social pour Demandeurs d’Asile (SPADA) qui a pour objectif l’information, l’orientation et l’accompagnement social et administratif des primo-demandeurs d’asile, ou du guichet unique pour demandeurs d’asile (GUDA) qui permet l’enregistrement de la demande d’asile à la préfecture, ou encore de celles et ceux qui ont été déboutés du droit d’asile et qui sont le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF).

La cristallisation de la question migratoire dans le champ politique trouve un écho favorable, des relais, au sein de la population mahoraise. En décembre 2023, autour du stade de Cavani, à Mamoudzou, la multiplication des cabanes de fortune bricolées par les migrants africains, avec du bois de récupération et des bâches bleues, avait donné naissance à la création d’un camp de migrants. Camp qui a cristallisé la colère et l’hostilité des collectifs de citoyens dénonçant le résultat d’une immigration clandestine incontrôlée[15]. Cette occupation du stade a constitué le point de départ du blocus de l’île de fin janvier à début mars 2024 ; son démantèlement n’ayant fait que provisoirement baisser la tension à Mayotte. Les migrants sont désormais, certes dispersés, mais toujours visibles, en particulier à la limite entre Tsoundzou 1 et Tsoundzou 2, où est localisé un centre d’hébergement d’urgence et d’insertion géré par l’association Coallia[16]. Néanmoins, la structure dispose d’un nombre limité de places. Certains migrants trouvent donc porte close. Ils se regroupent ensuite non loin des grilles, sous un arbre. Pour éviter tout nouveau processus « d’encampement » (Agier, 2011) et toute forme de violence, tension et agressions, cet espace est constamment surveillé par la police nationale. D’ailleurs, un arrêté municipal pris par le maire de Mamoudzou le 14 août 2024, interdit sur ces mêmes localités, tout rassemblement de plus de 5 individus dans le domaine public.

Document 1 – Photographie, « Étape Fulera », le village relais de Tsoundzou

Source : Anthony Goreau-Ponceaud et Olivier Chadoin (octobre 2024).

Depuis le démantèlement, la dialectique du visible et de l’invisible des migrants à Mayotte n’a fait que prendre de l’ampleur. Pour beaucoup de Mahorais, ces migrations africaines constituent un défi social supplémentaire à relever face à une absence de maîtrise des flux migratoires habituels en provenance des Comores conduisant à des processus d’altérisation.

Document 2 – Carte, Mayotte au sein de l’archipel des Comores

Légende : L’archipel des Comores est composé de quatre îles : Grande Comore, Mohéli, Anjouan et Mayotte. En accordant le 24 décembre 1976 le statut de « collectivité territoriale » à Mayotte, la France a marqué une rupture avec le fonctionnement et la composition de cet espace géographique. La frontière à Mayotte a non seulement modifié la circulation dans l’archipel des Comores, mais a également transformé l’évolution globale de l’île en de nombreux points : démographie, violence, représentations et revendications de la population (Blanchy 2002, Blanchy et al.,2019). Cette frontière politique reste peu contraignante jusqu’au 18 janvier 1995, date à laquelle le gouvernement Balladur décide d’entraver la circulation des personnes dans l’archipel des Comores en imposant un visa d’entrée à Mayotte aux habitants des trois autres îles comoriennes. Cette obligation de visa apparaît particulièrement symbolique d’une insularisation visant à couper Mayotte du reste de l’archipel.

Vers des processus d’altérisation

Dans le cadre du projet de recherche MIGRAF[17], nous avons mené, en octobre 2024, des enquêtes auprès de multiples acteurs (élus, associations, habitants, réfugiés, demandeurs d’asile et collectifs citoyens) sur la question de l’immigration à Mayotte ; à chaque fois les réactions sont similaires : ces derniers vivent dans un quotidien qu’ils ne parviennent pas à expliquer : « c’est complexe », « ici c’est un monde de fou », « ici tout est fou ».

Ces propos sont intimement liés à la question de l’autre. Une altérité à géométrie variable dont les régimes dépendent des crispations et des hiérarchisations du moment : tantôt c’est la présence de l’Africain qui est jugée comme problématique, tantôt celle du Congolais ou encore plus récemment celle du Somalien, sans pour autant venir totalement éclipser celle du Comorien (plus exactement du Grand-Comorien), et particulièrement de « l’Anjouanais » (Hachimi Alaoui, Lemercier et Palomares, 2013)[18]. L’usage de l’article défini (l’Anjouanais, le Congolais, l’Africain, le Grand comorien…), plutôt que l’article pluriel (les Anjouanais, les Congolais…) pour définir une population, que nous reprenons ici, est omniprésent dans nos entretiens. Il signe là encore la forme d’un régime d’altérité source d’opérations de fixation, d’essentialisation et de hiérarchisation qui se traduisent par des violences, des stigmatisations et du vigilantisme. Sont ainsi subsumés un ensemble de caractéristiques, attitudes, différences attribuées à un groupe social dont chaque individu devient un représentant ; sorte de macranthrope ethnico-culturel.

La majorité des travaux récents sur la situation mahoraise (Carayol, 2024 ; Roinsard, 2022 ; Sahraoui, 2020 ; Lemercier et al., 2014) signale à raison les ingrédients d’une situation post-coloniale (régime d’exception, rapports ambigus à l’hexagone, départementalisation inachevée, visa Balladur…) et l’histoire des circulations (Blanchy, 2002 : Blanchy, 2014 ; Cottereau, 2021) entre les îles de l’archipel. Ces éléments peuvent toutefois conduire à des analyses très générales présentant d’une part des individus agis par les forces de l’histoire et de la politique, d’autre part à ne pas voir les mécanismes par lesquels se construisent dans le quotidien les rapports sociaux, des altérités et hiérarchies. À cet égard, notre démarche, résolument ethnographique, mêlant observations et entretiens vise d’abord à saisir des représentations et expériences dans une logique compréhensive sans préjuger de ce que celles-ci doivent a priori à la situation postcoloniale. Avec cette approche « par le bas » nous souhaitons éviter le piège commun d’une explication mono-orientée selon laquelle « tout renvoie à la colonie sur cette île » (Carayol, 2024). Une telle démarche conduit à dépasser et nuancer l’idée d’une seule domination, d’un seul déterminant macrosociologique expliquant le social à toutes ses échelles. Il s’agit de mettre à jour la complexité et la pluralité des jeux de domination et des modes de construction des altérités ; autrement dit à tenter d’écouter les agents sociaux pour en comprendre les raisons d’agir et de penser.

D’autres mécanismes viennent renforcer cette production d’altérités indépassables à l’instar de ceux décrits par Norbert Elias et John L. Scotson (2022) sur le rôle social des commérages dans la fabrique d’une identité par différence renforçant le couple eux/nous. Il en est ainsi de la consommation des tomates[19] ou encore celle de tel ou tel poisson associée à certains groupes de migrants (« La bonite c’est un poisson uniquement consommé par les Anjouanais » ; « seuls les Anjouanais mangent de la bonite » avons-nous pu entendre dire). Si depuis 2020, les services de l’État alertent le consommateur du danger qu’est susceptible de représenter la consommation de tomates vendues sur le bord des routes du fait de la présence d’insecticides prohibés sur le territoire, le lien est souvent fait entre origine supposée du commerçant, souvent qualifié de clandestin ou d’anjouanais – et volonté d’empoisonnement. D’autres commérages s’appuient sur un certain nombre de fantasmes, c’est le cas par exemple des Evasans[20]. Les Mahorais ainsi enquêtés sont persuadés que plus de 90 %[21] des personnes qui « profitent » de ce dispositif d’évacuation sanitaire vers La Réunion sont des étrangers en situation irrégulière, ce qui est factuellement erroné : les personnes étrangères représentent environ 48 % de la population de Mayotte et 51 % des patients en Evasan. Une légère surreprésentation qu’il est possible d’expliquer par leurs renoncements antérieurs et successifs aux soins et non par un accès privilégié au service d’évacuations sanitaires.

Souvent stigmatisée et qualifiée de clandestine et illégale, cette présence migratoire se révèle pourtant à l’observation comme un élément nécessaire au fonctionnement social de l’île. Celles et ceux qui déplorent l’inaction et le manque de fermeté de l’État français se confondent parfois avec celles et ceux qui ont recours aux services de cette population étrangère. Cette dernière a en effet su trouver sa place que cela soit dans le secteur de la construction, de l’agriculture, des emplois domestiques (Riccio, 2022 ; Hochet et Bianchini, 2020) ou celui de la mobilité avec les taxis-motos dont les conducteurs sont tous des Africains du continent en situation irrégulière sur le territoire, le plus souvent Congolais. Comme si, dans un mouvement ironique de l’histoire, la présence migratoire, largement décrite comme source de tous les maux de l’île, était également pour partie une ressource permettant de palier aux défaillances des politiques publiques. Il s’ensuit une situation ambigüe qui frôle le « racisme sans la race » fondé sur l’antériorité entre établis et outsiders (Elias et Scotson, 2022) et le « narcissisme des petites différences » que Bernard Lahire (2023) emprunte à Freud pour prolonger la lecture sociologique de l’opposition eux/nous.

Comme le rappelle Nicolas Roinsard, « à Mayotte, comme dans bien d’autres pays du Sud, la régulation sociale de la pauvreté tient à l’économie morale inscrite dans les rapports sociaux de dépendance et de solidarité davantage qu’à une économie redistributive fondée sur une seule logique libérale » (Roinsard, 2022 : 165).

La mobilisation de collectifs qui se présentent et s’affirment comme citoyens

Ainsi de multiples associations de citoyens se sont progressivement constituées pour mettre fin au phénomène d’immigration clandestine à Mayotte. L’une des plus connues est « le collectif des citoyens de Mayotte 2018 », une association créée à la suite du mouvement social de 2018 qui se mobilise de nouveau depuis janvier 2024. Sa présidente, Safina Soula, dénonce ce qui constitue pour elle les failles du 101e département français, à savoir l’immigration, l’insécurité, l’éducation, et finalement la vie chère. En matière d’éducation, le collectif dénonce la saturation des écoles, phénomène qui serait lié aux inscriptions frauduleuses d’enfants en situation irrégulières[22]… ce qui aurait pour effet mécanique d’engendrer des situations d’échec scolaire et le taux de réussite au bac le plus bas de France. Le mouvement de contestation populaire qui ne cesse de prendre de l’ampleur à Mayotte depuis la mise en œuvre de la départementalisation appelle à un renforcement conjoint de la lutte contre l’immigration clandestine et contre l’insécurité grandissante. Pour beaucoup de Mahorais il y a un lien mécanique entre ces deux phénomènes.

Mais au fond, à ramener toutes les causes des malheurs de l’île à la question migratoire et identitaire, désormais nouvellement incarnée par le migrant africain, ces mouvements ne sont-ils pas piégés ? Ce piège identitaire n’empêche-t-il pas les populations locales de se projeter ? l’identité ne se construisant alors que par opposition à un autre et non par projection. Par exemple, lors d’un entretien avec le collectif citoyen 2018, une de nos interlocutrices qualifie, à notre grand étonnement, le Président Macron de « gauchiste ». Nous comprenons alors que cette identification ne repose pas sur une lecture des orientations en matière de politiques économiques et sociales du gouvernement. Le critère de démarcation premier est en fait celui de la position du gouvernement vis-à-vis des Comores. Cette position, loin d’être isolée, confirme l’incapacité d’une projection politique par-delà l’identité et révèle, pour les Mahorais, « un rapport inquiet à la nationalité » (Hachimi-Alaoui, 2016). Comme si désigner un coupable invisibilisait la question sociale et économique. Cette reconfiguration des frontières ethniques, malgré la persistance d’économies morales, de liens familiaux ou amicaux entre « Mahorais » et « Comoriens », entre « Mahorais » et « Africains » trouve sa source dans l’instauration d’une frontière nationale et européenne, de la partition politique de l’archipel, et de l’inquiétude simultanée des Mahorais quant à leur insertion dans l’État-nation français (Hachimi-Alaoui et al., 2013). Parmi les personnes enquêtées, il y a en effet une vraie inquiétude concernant cette citoyenneté française qui pourrait être supprimée par l’État français : comme si la départementalisation n’était pas un statut définitif. Pour Dénétem Touam Bona, « Peau comorienne, masques français… Le Mahorais se veut désormais autochtone. Un vrai Français de souche, pas un de ces étrangers qui débarquent en kwasa (barque) de l’île lointaine d’Anjouan » (2016 : 160).

Migrations et desseins politiques : Mayotte parlée

Cette double dialectique, du visible et de l’invisible, de l’inclus et de l’exclus sert le propos politique en hexagone, à telle enseigne qu’il semble que Mayotte soit plus parlée qu’elle ne parle. En déplacement dans l’île les 20 et 21 avril 2024, Marine Le Pen a fait de l’installation des migrants africains dans la rue le symbole du « chaos » qui « menace Mayotte d’un danger de mort », et de l’incapacité du gouvernement à « faire preuve d’autorité[23] ». À Mayotte, le Rassemblement National a fait un bond spectaculaire : il est passé de 2,72 % en 2012, à 42,68 % au premier tour de l’élection présidentielle de 2017. En 2022, Mayotte est le département où le Rassemblement National a réalisé son plus gros score au premier tour de la présidentielle, avec 42,89 % des suffrages, et aux dernières législatives, Anchya Bamana, a signé la première victoire du RN sur l’île : une hausse fulgurante à mettre en miroir d’une stratégie de déracialisation et de dédiabolisation du discours politique du RN en Outre-Mer qui s’adapte aux réalités de chaque territoire. À Mayotte, il n’est pas question de fustiger l’islam et l’islamisation (rappelons que 95 % des Mahorais se disent musulmans), mais la place des Comores et des Comoriens voire des Africains.

Lors d’un entretien, un représentant départemental du FN/RN nous rappelle opportunément : « nous ne sommes pas racistes, nous sommes noirs et musulmans ». Le Rassemblement national cultive depuis des années son électorat mahorais, qui prospère sur la pauvreté du département – Mayotte est le département le plus pauvre de France (77 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté national, soit cinq fois plus que la moyenne nationale) –, l’immigration illégale venue des Comores toutes proches et un sentiment d’être abandonné par le gouvernement.

Ce qui frappe directement dans les entretiens que nous avons menés, et cela de façon générale, c’est une incapacité, un empêchement, à penser l’avenir de Mayotte. Beaucoup de Mahorais sont très savants sur l’histoire de l’île et la départementalisation, l’histoire elle-même étant devenue un enjeu social et politique[24]. Beaucoup citent et connaissent les données qui font « masse » et expriment la question migratoire et celle de l’insécurité, mais très rares sont ceux qui sont capables d’identifier un projet propre de territoire, un projet dépassant la question de l’identité, du droit du sol et de l’attente de solutions métropolitaines. Comme si l’île était « asphyxiée par sa propre frontière », pris « d’un rêve pathogène d’une communauté homogène » (Touam Bona, 2016 : 157).

In fine, l’histoire et le patrimoine de l’île, ses traditions, sont comme écrasées par les enjeux de la départementalisation. Ainsi, par exemple le terme Banga qui désigne à l’origine un élément important du patrimoine et de la vie sociale mahoraise est aujourd’hui le mot qui est utilisé pour désigner les bidonvilles. Le Banga[25] passe d’une connotation positive – émancipation des jeunes hommes, rite de passage (Cassagnaud, 2010) architecture singulière – à une connotation négative (cabane précaire de tôle), au détriment du patrimoine mahorais. Seul point commun entre ces deux acceptions du banga : le caractère transitoire. L’adolescent à vocation à devenir adulte, le migrant à être décasé.

Autrement dit, si l’on observe bien une identité qui s’affirme selon un principe d’opposition (eux/nous), celle-ci reste encore incapable de définir une projection propre, une totalité.

Document 3 – Timbre Banga 1997

Source : https://www.lastdodo.fr/fr/items/9727273-le-banga

Mayotte : territoire d’exception ou laboratoire des possibles ?

Comme souvent en situation postcoloniale tout se passe comme si le territoire, d’abord historiquement conçu comme devant dégager des ressources, ne devrait pas coûter à la métropole. À Mayotte, l’exception s’impose. La politique migratoire, qui repose sur les expulsions systématiques et la précarisation juridique et sociale[26], se cumule à une départementalisation inachevée[27].

Il semble que les Mahorais ne parviennent plus à voir ces droits différents de ceux de la métropole (Roinsard, 2014), ce régime dérogatoire, et sont prêts à les réduire[28] pour des questions identitaires. La question identitaire écrase toutes les différentiations partisanes sur les plans économique et social. En cela, le 101e département apparaît souvent aux yeux des observateurs comme un laboratoire. Sur le plan critique, on peut clairement y voir un lieu d’expérimentation politique consistant, d’un côté, à réduire la main gauche de l’État tenant par sa main droite, de l’autre, une politique migratoire ferme tentée par une fin du droit du sol sur l’ensemble du territoire après Mayotte.

Au fond, continuer à regarder, voir et lire ce territoire au prisme des seules visions postcoloniales empêche de le voir pour ce qu’il est : un territoire d’expérimentation et des possibles exemplaires. Envisager l’avenir de Mayotte ne passera sûrement pas par la réduction de ses difficultés face aux enjeux et projections métropolitaines. Il apparaît nécessaire de regarder ce qu’est véritablement ce territoire, en tentant de saisir la crise qu’il traverse comme une occasion de repenser nombres des enjeux qui se dressent devant nous et qui se trouvent concentrés à Mayotte (explosion démographique, raréfaction des ressources, dégradations de l’environnement). En ce sens l’île pourrait être mieux que le lieu d’expérimentation de politiques du moins, ou pire, le territoire exemple des désordres liés aux flux migratoires pris dans les jeux d’un champ politique hexagonal courant derrière les thèses du FN/RN. Pour cela, il faut sans doute regarder le territoire pour ce qu’il est, se défaire de l’idée qu’il ne pourra être sauvé que de l’extérieur, à l’image de la promesse présidentielle d’une piste longue d’aéroport[29] qui procède d’une logique de développement ancienne qui voudrait encore une fois voir le salut de cette île arriver plus vite encore depuis l’extérieur. Comme le Chicago des années 1920 fut le laboratoire d’un renouveau de la sociologie et de l’anthropologie urbaine, Mayotte s’impose comme un territoire où se concentrent et s’illustrent aujourd’hui quasiment tous les enjeux du XXIe siècle. Ce territoire pourrait donc être tout à la fois un laboratoire scientifique et politique, un lieu où s’expérimentent des projets, des solutions, sociales, économiques, environnementales, des coopérations scientifiques, de façon positive en lieu et place d’une île otage des questions identitaires amplifiées par le jeu politique national.

Bibliographie

AGIER Michel, 2011. « L’encampement du monde », Plein droit, vol. 3, n° 90, p. 21-24.

APPANAH Natacha, 2016. Tropique de la violence. Paris, Gallimard.

BLANCHY Sophie, RICCIO Damien, ROINSARD Nicolas, SAKOYAN Juliette, 2019. « Mayotte : de quoi la violence est-elle le nom ? », Plein droit, n° 120, p. 12-15, DOI 10.3917/pld.120.0012

BLANCHY Sophie, 2014. « Intégrations et exclusions. La production différenciée des hiérarchies sociales aux Comores », Études rurales, n° 194, DOI : 10.4000/etudesrurales.10099

BLANCHY Sophie, 2002. « Mayotte : “française à tout prix” », Ethnologie française, vol. 32, n° 4, p. 677-687.

CASSAGNAUD Josy, 2010. « Le banga de Mayotte comme rite de passage », Kabaro, revue internationale des Sciences de l’Homme et des Sociétés, vol. 6-7, p. 334-342, https://hal.univ-reunion.fr/hal-03538427v1/document

CARAYOL Rémi, 2024. Mayotte. Département colonie. Paris, La Fabrique éditions.

COTTEREAU Victoire, 2021. « Mayotte, vers une île “forteresse” ? Histoire et conséquences d’une frontière controversée », L’Information géographique, vol. 85, n° 1, p. 8-30, https://doi.org/10.3917/lig.851.0008

ELIAS Norbert et SCOTSON John-L., 2022. Logiques de l’exclusion. Paris, Fayard.

HACHIMI-ALAOUI Myriam, LEMERCIER Myriam et PALOMARES Élise, 2013. « Reconfigurations ethniques à Mayotte », Hommes & migrations, n° 1304, p. 59-65, DOI : 10.4000/hommesmigrations.2641

HACHIMI-ALAOUI Myriam, 2016. « Françaises et Français de Mayotte. Un rapport inquiet à la nationalité », Politix, vol. 4, n° 116, p. 115-138.

HOCHET Antoine et BIANCHINI Victor, 2020. « L’économie informelle à Mayotte en contexte de départementalisation », Revue internationale des études du développement, n° 244, p. 7-28.

LAHIRE Bernard, 2023. Les structures fondamentales des sociétés humaines. Paris, La Découverte.

LEMERCIER Élise, MUNI TOKE Valelia, PALOMARES Élise, 2014. « Les Outre-mer français. Regards ethnographiques sur une catégorie politique », Terrains et travaux, vol. 1, n° 24, p. 5-38.

LEHUGER Clémentine, 2024. « Se réinventer à Mayotte. La migration des agent·es métropolitain·es au sein de l’État postcolonial », Revue européenne des migrations internationales, vol. 40, n° 2, DOI : https://doi.org/10.4000/12htw

LOTTE HOAREAU Lynda, BELIARD Aude, POURETTE Dolorès, COTTEREAU Victoire, GABARRO Céline et TIBI-LEVY Yaël, 2023. « Le dispositif EVASAN de Mayotte vers La Réunion », Suds, 288, DOI : https://doi.org/10.4000/suds.579

MORANO Alison, 2022. « La figure des “enfants du juge” ou le conflit des normes éducatives à Mayotte », Journal des africanistes, vol. 92, n° 1, p. 102-125, DOI : https://doi.org/10.4000/africanistes.12020

MOREAU Sophie et MARSZEK Aurélien, 2012. « Géopolitiques mahoraise et réunionnaise : de la crise actuelle à un état des lieux régional », Hérodote, vol. 2, n° 145, p. 150-160.

RICCIO Damien, 2022. La condition clandestine : une ethnographie des travailleurs migrants à Mayotte. Science politique. Université de Bordeaux, Thèse de doctorat, https://theses.hal.science/tel-03771544

RICHEVAL Camille, HUMBERT Luc, DUPILET Marie, SAINT-OMER Apolline, COTTEREAU Victoire, PEYRE Alexandre, PLEIGNET Éric, CHERKI Sabrina, ALLORGE Delphine, GAULIER Jean-Michel, DEVAULT Damien, 2023. « Un panorama actuel de la nature de “La Chimique” consommée à Mayotte : résultats préliminaires de CHASSE-MARÉE », Toxicologie Analytique et Clinique, vol. 35, n° 2, https://doi.org/10.1016/j.toxac.2023.03.043

ROINSARD Nicolas, 2022. Une situation postcoloniale. Mayotte ou le gouvernement des étrangers. Paris, CNRS Éditions.

ROINSARD Nicolas, 2014. « Conditions de vie, pauvreté et protection sociale à Mayotte : une approche pluridimensionnelle des inégalités », Revue française des affaires sociales, n° 4, p. 28-49.

SAHRAOUI Nina, 2020. « Le “nécropouvoir” dans le contrôle migratoire et ses implications genrées dans les périphéries postcoloniales françaises de l’Océan indien », Migrations Société, vol. 4, n° 182.

TOUAM BONA Dénétem, 2016. « Mayotte, l’archipel censuré », Africultures, vol. 1, n° 105, p. 154-167, https://doi.org/10.3917/afcul.105.0154


[1] https://www.ouest-france.fr/mayotte/a-mayotte-des-rotations-d-eleves-dans-les-ecoles-surchargees-fd157f96-3a85-11ed-9b76-9edc71c5adb1

[2] https://www.youtube.com/watch?v=QeOrqK-NyEU

[3] https://la1ere.francetvinfo.fr/mayotte/une-femme-de-26-ans-agressee-a-coups-de-machette-sur-une-plage-pres-de-kani-be-1452752.html

[4] https://www.mayottehebdo.com/actualite/justice/les-coupeurs-de-route-magnele-et-maendjib-restent-en-prison/

[5] https://www.insee.fr/fr/statistiques/5763061

[6] https://www.gendarmerie.interieur.gouv.fr/gendinfo/en-images/mayotte-operation-balades-tranquilles-pour-securiser-les-lieux-touristiques

[7] Il s’agit là d’une expression que nous empruntons aux personnes enquêtées.

[8] https://www.insee.fr/fr/statistiques/4632225

[9] Dans son article, Alison Morano montre que trois systèmes socio-éducatifs coexistent à Mayotte et reconfigurent les contours de la parentalité. Le premier est qualifié de comorien et est ancré dans les circulations anciennes de l’archipel mais a été concurrencé par la départementalisation. Le second est nommé français et s’est imposé, selon l’anthropologue comme une norme, et le troisième s’instaure sur la base de pratiques syncrétiques (Morano : 2022). Pour Nicolas Roinsard, « signe d’une assimilation qui travaille la société, l’autorité régie selon un ordre coutumier s’est délitée pour se déplacer vers les enseignants et les juges dont la fonction ne reprend pas à la lettre celle qui était assurée jusqu’alors par les figures d’autorité familiales, villageoises et religieuses » (2022 : 289).

[10] En d’autres termes, sauf s’ils en sont dispensés par le pays dont ils ont la nationalité (ce qui n’est le cas d’aucun des pays voisins de Mayotte), les titulaires d’un titre de séjour à validité limitée à Mayotte sont soumis à l’exigence d’un visa pour se rendre en métropole ou dans un département et région d’outre-mer.

[11] https://www.mayottehebdo.com/actualite/immigration/le-bureau-des-etrangers-bloque-depuis-ce-lundi/

[12] https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/comptes-rendus/seance/session-ordinaire-de-2024-2025/seance-du-mercredi-02-octobre-2024

[13] https://www.la-croix.com/mayotte-plus-de-300-refugies-africains-evacues-vers-l-hexagone-20240226

[14] Le HUDA de Mayotte est géré par l’association Solidarité Mayotte qui assure l’assistance, l’accueil, l’hébergement, l’accompagnement social, ainsi que l’insertion des demandeurs d’asile et bénéficiaires de la protection internationale sur le département. Le HUDA est un dispositif qui compte près de 200 places évolutives, ouvertes aux demandeurs d’asiles et aux personnes vulnérables, jusqu’à la fin de leur procédure devant l’Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA) ou devant la Cours Nationale du Droit d’Asile (CNDA), en cas de recours. Un accompagnement social, juridique et administratif est dispensé et vise à soutenir les demandeurs d’asile dans leur procédure.

[15] https://la1ere.francetvinfo.fr/mayotte/il-faut-que-l-etat-reconnaisse-qu-on-ne-peut-pas-continuer-a-ce-rythme-annonce-safina-soula-la-presidente-du-collectif-des-citoyens-de-mayotte-2018-1535974.html

[16] Ce centre d’hébergement d’urgence accueille toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale, isolée ou en famille. Il s’agit d’un accueil inconditionnel, c’est-à-dire notamment sans condition de régularité de séjour. À Mayotte, dans le but d’éradiquer les bidonvilles, l’État s’est doté d’un nouveau dispositif d’hébergement et d’insertion en faveur des familles vivant dans des conditions insalubres et indignes : Étape Fulera. Ces villages-relais sont des centres d’hébergement dédiés à l’accueil des familles concernées par les opérations de lutte contre l’habitat illégal (LHIL) de lutte contre l’habitat indigne (LHI) ou les opérations de résorption de l’habitat insalubre (RHI). L’association COALLIA est gestionnaire de l’établissement « Étape Fulera ».

[17] https://www.mshbx.fr/migrations-asiles-et-frontieres-a-la-reunion-et-mayotte-migraf/

[18] Dans ce jeu complexe et très labile de constructions des frontières ethniques il est possible d’ajouter celle des « métropolitains » ou « métros » ou « wazungus » en shimaoré qui signifie « personnes blanches ». Comme le précise Clémentine Lehuger, à propos de ces expatriés, « la difficulté à définir ce groupe social tient à la complexité des ressorts de cette catégorie, qui confond sans les hiérarchiser des caractéristiques d’ordre racial et social, mais aussi fondées sur le partage de certaines expériences — en particulier celle de l’éloignement — et de certains modes de vie » (2024).

[19] https://la1ere.francetvinfo.fr/mayotte/pesticides-les-vendeurs-de-tomate-sous-surveillance-renforcee-de-la-prefecture-de-mayotte-1538659.html

[20] Selon Lotte Hoareau et al., « Le plateau technique d’accueil de La Réunion représente 93 % des évacuations sanitaires au départ de Mayotte. Celles-ci viennent pallier le manque de moyens, d’équipements médico-techniques, de professionnels de santé à Mayotte. […] Le dispositif EVASAN peut être utilisé dans un objectif de « délestage » des services surchargés vers le Centre Hospitalier Universitaire (CHU) et les centres de soin de La Réunion » (2023).

[21] Si ce pourcentage nous a régulièrement été donné, plus globalement nous avons été surpris de constater à quels points les personnes enquêtées arrivent à produire des chiffres (sans que l’on sache les catégories qui se cachent derrière ces dénombrements) dans le but d’objectiver leurs propos.

[22] À ce titre des agents municipaux et des mairies ont parfois fait preuve d’excès de zèle en réclamant de manière illégale des pièces justificatives en grand nombre pour procéder à l’inscription des enfants à l’école dans le but de restreindre le nombre de certificat de scolarité à établir. Certificats qui permettent par la suite de justifier d’une durée continue de présence sur le territoire et donc de procéder à la demande d’un titre de séjour.

[23] https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/04/22/a-mayotte-marine-le-pen-accuse-le-gouvernement-d-abandonner-l-ile-au-chaos_6229170_823448.html

[24] https://www.youtube.com/watch?v=tAnMc7nkMTA

[25] https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/mayotte-bidon-ville-maison-traditionnelle-ganga-nitration-societe-matriarcale-jeune-homme

[26] À Mayotte, l’Aide Médicale d’Etat (AME) destinée aux personnes qui résident de manière irrégulière sur le territoire national ainsi que la Protection Universelle Maladie (PUMA) qui permet de prendre en charge les frais de santé des personnes dépourvues d’assurance maladie ne sont pas appliquées. À ces éléments s’ajoutent des logiques d’obstruction administrative par les blocages de la préfecture notamment.

[27] Inachevée dans le sens où les politiques sociales et éducatives restent sous-dimensionnées. Dans le sens également où les prestations sociales, les minimas sociaux et le SMIC sont minorées voire pour certaines inexistantes. Comme le mentionne Nicolas Roinsard, « sur l’ensemble des prestations de la branche famille qui existent au niveau national (plus d’une vingtaine) seules cinq sont servies à Mayotte » et seules trois sont appliquées à taux plein (2022 : 87).

[28] Dans une tribune accordée au Figaro, la députée Estelle Youssouffa revient sur la nécessité d’abroger le droit du sol à Mayotte. https://www.lefigaro.fr/vox/societe/estelle-youssouffa-il-n-y-a-plus-d-autre-choix-que-d-abroger-le-droit-du-sol-a-mayotte-20241011

[29] https://www.mayottehebdo.com/actualite/amenagement/piste-longue-les-resultats-des-etudes-detailles-les-elus-mahorais-reagissent/


Télécharger l’article (pdf)


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
mshbordeaux (9 décembre 2024). Mayotte, laboratoire des possibles : par-delà le piège identitaire et le déterminisme postcolonial. Maison des Sciences Humaines Bordeaux. Consulté le 10 février 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/12vc1


Vous aimerez aussi...

3 réponses

  1. 10 décembre 2024

    […] asiles et frontières à La Réunion et Mayotte – MIGRAF (AAP MSHBx 2024). Lire l’article: https://mshbordeaux.hypotheses.org/12441 Rubrique Chroniques de la […]

  2. 23 décembre 2024

    […] la crise démographique. Envisager “l’après”, c’est aussi faire de Mayotte une actrice d’un projet et d’un récit, d’une mémoire collective, expérience et attitude face au […]

  3. 22 janvier 2025

    […] Mayotte, laboratoire des possibles : par-delà le piège identitaire et le déterminisme postcoloni… […]

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.